Agriculteur à Théméricourt (Val-d’Oise), Aurélien Sargeret est président du syndicat du Vexin.

« Les droits de douane annoncés par Donald Trump sont une nouvelle entrave aux productions que nous vendons à l’étranger. Cela va rendre la France moins compétitive, faire baisser les exportations et d’autres pays vont en bénéficier. C’est encore une décision que les agriculteurs subissent. Depuis la guerre en Ukraine, la géopolitique joue beaucoup trop sur nos prix. Il y a aussi eu l’accord sur le Mercosur et les tensions avec l’Algérie, qui ne nous achète plus de blé. Nous rentrons dans des guerres économiques qui se jouent au niveau mondial. Dans nos exploitations agricoles, nous n’y sommes pour rien et subissons l’ensemble de ces décisions.

La France n’a plus d’importance sur les marchés. Avant, lorsque nous faisions une mauvaise récolte, il y avait un problème de stocks et les cours montaient. L’an dernier a été la pire récolte en blé depuis 40 ans et ça n’a pas fait monter les cours, bien au contraire. La double peine d’une récolte médiocre, en qualité et en rendement, conjuguée à des prix peu élevés fait que les calculs ne sont pas bons pour nos trésoreries. L’agriculteur est la variable d’ajustement de ces politiques internationales alors que nous demandons juste que nos productions aient des débouchés pour les vendre au meilleur prix.

Parole, parole

Au niveau de la politique nationale, c’est un peu toujours la même chose : de belles paroles tenues au Salon de l’agriculture. On nous promet des aides, l’adoption de la loi »entraves«, mais au final rien, report sur report.

Notre métier a besoin de solutions concrètes pour la sauvegarde de notre agriculture et bien sûr de la souveraineté alimentaire. Il nous faut une vision d’avenir, avec des cours stables et la possibilité d’utiliser les mêmes moyens de production que nos voisins, afin d’être à égalité en termes de conditions de concurrence. Avec les outils que nous n’avons plus le droit d’utiliser, une distorsion de concurrence de plus, cela devient compliqué d’exercer notre métier. Je ne vois pas comment les cours pourraient remonter, donc certaines exploitations vont avoir de gros problèmes de trésorerie.

Ce manque de visibilité est en partie dû au manque d’action et de courage des politiques. C’est bien beau de nous brosser dans le sens du poil lors des manifestations, mais nous attendons toujours des actes tel que des votes à l’Assemblée ou des aides concrètes pour soulager nos exploitations. Cet énième report du vote de la loi »entraves« est une provocation supplémentaire. Nos politiques n’ont pas pris la pleine mesure de la détresse du monde entier agricole.

Restons mobilisés, sans réponses rapides du gouvernement, nous repartirons sur le front et des actions auront à nouveau lieu. »