« On aimerait pouvoir vivre correctement de ce que l’on fait »
Agriculteur à Ballancourt-sur-Essonne, Frédéric Bouché est président de la Fédération des entrepreneurs des territoires Île-de-France et membre du conseil d’administration de la FDSEA Île-de-France.
» Le constat est déprimant : en tant qu’ETA*, on travaille pour la gloire aujourd’hui. Nous cumulons plusieurs difficultés. D’abord, nous subissons l’effet ciseau tant redouté : hausse des coûts, baisse des revenus. Étant donné la conjoncture actuelle, nous aurions dû augmenter nos tarifs de 25 %, mais c’était impossible, car nous aurions perdu trop de clients, certains étant eux-mêmes déjà dans une situation financière délicate.
Autre problème : notre matériel se doit d’être le plus performant et moderne possible par rapport à une entreprise “ lambda ” pour répondre aux besoins (moindre impact sur l’environnement, débit de chantier suffisant, sécurité et confort de travail de nos salariés, etc.), ce qui génère un surcoût non négligeable. Sans compter les mises aux normes et le respect des diverses réglementations, qui rajoutent des difficultés dans la gestion de nos entreprises et dans nos activités, ainsi que des problèmes pour circuler avec nos engins sur un réseau routier chargé et inadapté. Sur une moissonneuse-batteuse, par exemple, on ne peut plus avoir de jumelage, il faut s’équiper en chenille, ce qui implique une facture de 70 000 euros.
De même, la météo a impacté les cultures et retardé voire empêché certaines interventions dans les champs et dans les forêts. Et si on ne peut pas travailler, l’argent ne rentre pas …
Trouver du personnel est également un casse-tête. Les jeunes veulent faire des horaires moins importants. Et surtout, il leur est difficile de se loger dans nos régions périurbaines.
Dernier point noir : de nombreux agriculteurs veulent faire de l’ETA, mais ils utilisent le “ tarif d’entraide ”, ce qui nous place en position compliquée, ce tarif n’est pas adapté à la situation car il ne reflète pas la réalité de nos coûts.
Pour toutes ces raisons, le réseau départemental et régional de la FNEDT a alerté le gouvernement sur les risques de faillites en cascade et d’entreprises actuellement au bord de la cessation de paiement.
À titre personnel, je pensais que passé 50 ans, j’aurais pu commencer à songer à me constituer un petit capital pour ma retraite. Mais aujourd’hui, je gagne moins d’argent que quand j’ai commencé. C’est dur. On aimerait tous pouvoir vivre correctement de ce que l’on fait.
Je continue néanmoins à avoir des projets : j’envisage de construire un second bâtiment photovoltaïque. Il faut que je trouve un système de financement adapté. Et que la météo s’améliore ! «