Agriculteur à Boissy-l’Aillerie (Val-d’Oise), Paul Dubray est conseiller départemental en charge de la ruralité et des relations avec le monde agricole, président du syndicat local du Vexin et administrateur de la FDSEA Île-de-France.
« De plus en plus, les consommateurs veulent manger local. Je le constate auprès des directeurs d’établissements scolaires, de maisons de retraite, ainsi que des maires des petites communes de mon département. Les mentalités ont changé, et c’est positif! Les circuits courts permettent des économies d’énergie et de transport, c’est bon pour l’environnement et le portefeuille.
Actuellement, nous avons une cuisine centrale qui fournit une quarantaine de collèges, sur les 114 que comptera le département du Val-d’Oise à la rentrée prochaine. La marge de progression est donc importante. Pour les producteurs, s’engager dans une telle démarche a plusieurs avantages. D’abord, c’est une source de diversification. Dans la période de crise agricole que nous connaissons tous, la diversification ou la double activité sont des moyens de trouver des revenus complémentaires. En se passant d’un certain nombre d’intermédiaires, on peut aussi augmenter les revenus.
Et puis, c’est aussi une fierté de savoir que nous sommes toujours là pour nourrir la population. Ces dernières années, à cause de l’agribashing, nous avions un peu perdu de vue cet aspect. Le soutien massif de la population lors de nos manifestations, cet hiver, nous a montré que cette fonction primordiale de notre métier était toujours bien présente. Faire des légumes pour donner à manger aux enfants de mon secteur est une fierté pour moi.
La mise en route de cette démarche est longue et complexe. L’objectif est d’aller vers un partage des risques. Ainsi, si le producteur connaît une mauvaise année, il faut pouvoir compenser; par exemple si la récolte des fraises n’est pas bonne, il doit pouvoir s’y retrouver en proposant des compotes ou de la confiture. La collectivité doit donc prendre sa part de risque. De la même façon, en période de vacances scolaires, la production ne s’arrête pas! Nous travaillons aujourd’hui avec les Ephad et les maisons de retraite pour trouver des débouchés à nos produits pendant ces périodes de congés. Il faudrait parvenir à proposer des contrats de moyenne durée (quatre à cinq ans) afin de rassurer les producteurs sur le fait qu’ils vont rentabiliser leurs investissements.
Nous travaillons aussi avec d’autres départements pour essayer de trouver des producteurs locaux désireux de s’engager dans ce processus, et construire en commun des unités de transformation et de conservation. La prochaine étape est de se compter, de voir les interlocuteurs prêts à se lancer dans cette aventure. Nous allons également rendre visite à des collectivités qui sont déjà bien avancées dans ce type de démarche afin de comprendre les obstacles et difficultés qu’elles ont rencontrés.
Nous avons la volonté d’avancer vite! Car c’est un projet très motivant. Le but est que les élèves des collèges et lycées locaux puissent se dire que leur déjeuner de la cantine vient de ce qu’ils voient le matin dans les champs en allant à l’école. »